à la Compagnie Générale des Voitures (G3), boulevard de la Chapelle à Paris. |
« J’avais décidé d’apprendre le métier de chauffeur de taxi, à 18 ans, après avoir été réformé à la suite d’une chute de cheval survenue pendant mon service militaire, alors que j’étais Brigadier de Cavalerie et apprenais à lire les cartes d’Etat-major.
Au début de la guerre, j’ai vu tout le monde partir. J’ai voulu m’engager comme volontaire, ce n’était pas possible et puis un jour, le 5 septembre, lorsque je suis arrivé à mon garage, je l’ai trouvé fermé.
Le chef de garage nous a dit : « Entrez au bureau, nous sommes réquisitionnés. »
Les officiers-majors de l’armée de Galliéni, de la place de Paris nous attendaient. Ils nous ont fait passer une visite médicale.
J’étais un des plus jeunes chauffeurs puisque j’étais réformé n° 1, mutilé à 30 % et que toute ma classe était sur le front.
Les officiers m’ont dit : « On ne peut pas vous prendre, vous n’êtes plus militaire, vous êtes réformé. » Alors mes collègues ont rouspété naturellement en disant : « C’est lui le plus jeune, il va rester là, et nous, nous allons partir ! » « S’il veut être volontaire, on le prend » répondirent les militaires.
J’ai accepté, je n’ai pas voulu me dégonfler et c’est comme cela que je suis parti.
Les officiers nous emmenèrent aux Invalides. Dans chaque quartier, on avait ramassé des taxis. On a vu arriver Galliéni, il a donné des ordres pour que tous les taxis soient réquisitionnés afin d’emmener les soldats à l’Est. Puis il a salué et il est parti.
Un officier m’a ensuite conduit porte de la Chapelle. Il fallait transporter les soldats jusqu’au Plessis-Belleville. Là, l’officier m’a dit : « Tachez de prendre du ravitaillement, là où vous allez, vous ne trouverez pas de commerces. »
Puis nous sommes partis par la porte de Vincennes, sans lumière, pour éviter d’être repérés par les Allemands. Nous avions seulement droit à une lumière arrière, mais c’était une lanterne à pétrole. Il ne faisait pas bien clair.
Arrivés à Gagny nous avons embarqué les troupes. Chaque taxi devait transporter cinq soldats.
Les officiers ont demandé aux chauffeurs qui connaissaient la région de prendre la tête et ils ont dit : « les Allemands sont à Meaux, et il ne faut surtout pas qu’ils sachent ce que trame Galliéni. »
Cela dura 11 jours. Je transportais des troupes fraîches dans un sens et des blessés dans l’autre.
On ramenait des blessés, parfois des femmes et des enfants. Ils erraient sur les routes sans moyen de transport. »
Kléber Berrier |
Kléber Berrier devant le Taxi de la Marne des Invalides
Interview de Kléber Berrier sur le site de l'INA (08/09/1984)
Mission 1 - Objectif 2
Conduire un taxi de la Marne :